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Georges Brassens Frachet
4 février 2018

Brassens ou la mauvaise herbe, Larue

Georges Brassens et André Larue

Brassens ou la mauvaise herbe est un récit largement biographique écrit par "Géo", l'ami de "Basdorf" André Larue, sur son ami Georges Brassens.

Référence : André Larue, "Brassens ou la mauvaise herbe", éditions Fayard, 1970

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1- Portrait de Georges Brassens   2- Brassens et Jeanne dans l'impasse    
3- "Georges Brassens" sur le magazine Jazz

1- Georges Brassens et André Larue

Georges Brassens et André Larue, c'est une "vieille" amitié qui a débuté au temps du STO en Allemagne au printemps 1943. Là-bas à Basdorf, Georges Brassens est "Le Poète" ou également "Bidet", un type quelque peu curieux qui martèle à longueur de temps de ses doigts tout ce qui passe à sa portée, le bois d'une table ou la tôle d'un placard. Ils vivent dans le même baraquement -alors qu'Onteniente, le futur "Gibraltar" en occupe un autre, un peu plus loin- et immédiatement, une vraie amitié naît entre les deux hommes.

Georges Brassens "se fait la belle", 'oubliant' de regagner Basdorf après une permission, et se cache chez Jeanne impasse Florimont. Ils se retrouvent dans le Paris de l'après-guerre et pendant trois ans, Larue va partager les rêves et les désillusions de Brassens, ses nouvelles chansons qu'il chante à sas amis comme il le fera toujours, ses poésies et ses textes d'inspiration surréaliste qui ne trouvent pas d'éditeur, il l'accompagne ainsi dans sa "période libertaire", une bohème faite de maigres repas avec "les copains d'abord". Il passe ainsi ses journées à écrire, à reprendre sans cesse chansons et textes, souvent sur son lit tant le logis est exigu. Il est alors comme il le chantera plus tard la mauvaise herbe qui croît à l'écart de la société, symbole d'un monde marginal qui n'aime pas beaucoup les flics et les bourgeois [1] un "poète maudit" soutenu par quelques amis [2] et surtout Jeanne, toujours à sa machine à coudre pour gagner quelques sous ou son mari Marcel Planche qui deviendra l'auvergnat.

Son recueil de poésies A la Venvole [3]contient des thèmes chers à Brassens, un poème comme "Nous leur pardonnerons" annonce, selon André Larue, dix ans avant, "La mauvaise réputation". "Opinion" et déjà anticlérical, débutant par ces vers :

Le clergé vit au détriment
Du peuple qu'il vole et qu'il gruge
Et que finalement
Il juge.

Ses vers, souvent emprunts d'ironie, révèlent au fond de pessimisme qu'il confirmera plus tard dans les interviews données à son ami André Sève, [4] comme dans ces trois vers :

                                        
Le siècle où nous vivons est un siècle pourri,
                                       
Tout n'est que lâcheté, bassesse,
                                       
Les plus grands assassins vont aux plus grandes messes...

2- De Basdorf à Paris 

Baraquement 26/5 à Basdorf. Avec les Allemands, ils jouaient au chat et à la souris, l'idée étant bien sûr d'en faire le mins possible à l'usine BMW. Brassens se place souvent "au-dessus de la mêlée", se gardant des groupes concurrents, souvent provocateurs, laissant à ses amis André Larue et René Iskin monter en "première ligne". [5] Comme il l'écrivit dans sa chanson Le Pluriel : « Dès qu'on est plus de quatre / On est une bande de cons. » Quasi secrètement, il travaillait à un roman anarchisant qu'il appelait alors Lalie Kakamou. Il noircissait beaucoup de papier, sans vraiment trouver son style, beaucoup de bluettes et quelques chansons contre la guerre. n octobre 1943, en tapotant sa musique sur une caisse comme à son habitude, il crée Maman, papa en pensant à ses parents restés à Sète :

Maman, maman, en faisant cette chanson,
Maman, maman, je deviens petit garçon...

A force de travail, le style s'affine, il composera ensuite "Pauvre Martin" qui, avec sur la lèvre un doux chant, s'en allait trimer au champ..." [6] A Basdorf, Brassens pense à Jeanne, celle qui lui écrivait, lui envoyait des colis, pour qui il écrivit (déjà) une chanson Pour ma Jeannette. Le 6 mars 1944, Brassens regagne Paris, officiellement pour "maladie grave". Il ne reviendra pas et, sommé de quitter son gite rue d'Alésia chez la tante Antoinette, il se réfugie tout près de là "chez Jeanne et Marcel".

De retour à paris, André Larue fréquente assidûment l'impasse Florimont et y fait la conquête de Jeanne. (ce qui n'était pas une mince affaire) Quand Jeanne disait : « ton copain ne me plaît pas, » Georges n'insistait pas; elle était d'une jalousie féroce. Les copains projetèrent de lancer un journal anarchiste Le cri des gueux, belle idée restée lettre morte faute d'argent. En attendant, André Larue devient journaliste à France-Soir et Pierre Onteniente travaille à la perception du 9è arrondissement. Brassens compose, écrit, noircit encore du papier, et a alors une tête hirsute et une dégaine interlope, pensent les braves gens qui lui font une mauvaise réputation.

Mais en fait Brassens "travaille", il écrit la première version de "La chasse aux papillons" et de "J'ai rendez-vous avec vous" mais il comprend qu'il doit encore évoluer, encore travailler. C'est sur un quai de métro à "Denfert" qu'il va rencontrer la petite Jo qui se prénomme en réalité "Jeannine", une môme fantasque, un peu "mytho" qui lui fera des misères mais lui inspirera "Une jolie fleur" et "Putain de toi". [7] Brassens s'intéressait beaucoup au mouvement anarchiste, lisant Proud'hon et Bakounine. Il rencontre alors Marcel Lepoil et le poète Armand Robin; il écrit régulièrement dans Le Libertaire où soucieux du style et de la syntaxe, on le surnomme Jo la cédille. En 1947, il se décida à publier à compte d'auteur et sous le sigle de la NRF son œuvre, « série de sensations et d'imagination poétique » qu'il publia sous le titre La lune écoute aux portes. Mais "Gallimard" ne réagit pas à cette provocation et Brassens en fut pour ses frais.

  3- Georges Brassens et Jeanne 

Cette "mauvaise herbe" dont il est question dans le titre d'André Larue, est en fait une chanson de Brassens. Le chanteur va finir par quitter l'impasse Florimont à l'occasion d'une brouille avec Jeanne". Après le décès de Marcel, l'auvergnat" en mai 1965, "Jeanne" s'enticha d'un autre Georges qui se nommait "Sanjak" avec qui elle se remaria rapidement. Brassens quitta alors l'impasse Florimont et prit un appartement dans le quartier, au 12ème étage d'un immeuble moderne rue Émile-Dubois. Mais quand "Jeanne" déjà bien affaiblie, mourut en octobre 1968 à l'hôpital Saint-Joseph, il était là pour la veiller.

4- Joha et les premiers succès

Sa "traversée du désert" où il se cherche entre chanter, composer et écrire des roamns de 1947 à 1952 devait être cependant marquée par deux événements d'importance :

- En 1947, Brassens rencontre chez des amis celle qui deviendra la femme de sa vie Joha Heyman qu'à son habitude il baptisa d'abord "la chenille" puis Puppchen la petite poupée qui lui rappelait l'Allemagne et repose à ses côtés au cimetière du Py à Sète. 'est selon André Larue « une petite jeune femme blonde, l'œil malicieux, l'air intelligent, la voix douce teintée d'un accent slave... »

- Il est enfin parvenu à trouver son style avec "Le mari bricoleur" dont il fredonne à Larue le refrain « Ah: quel bonheur d'avoir un mari bricoleur » puis avec "Le parapluie". Sur sa lancée, il compose les chansons qui deviendront ses premiers succès La mauvaise réputation, Le gorille et Brave Margot. Ce sont en fait ses deux copains sétois Victor Laville et Roger Thérond qui, le soir du 6 mars 1952, entraînent l'ami Brassens qui n'avait nulle envie de prendre encore une veste, dans le cabaret de Patachou. Brassens, confie André Larue, mort de peur comme d'habitude, hésita à pousser la porte du cabaret, sans savoir bien sûr qu'allait s'ouvrir pour lui la porte du succès.

5- Infos complémentaires

   Notes et références

  1. Parmi les chansons qu'il leur a consacrés, retenons deux chansons à l'ironie appuyée, "le nombril des femmes d'agents" et "Hécatombe" ou "les croquants", ces « bourgeois qui vont en ville acheter des pucelles...»
  2. On peut citer parmi les plus importants de cette époque, outre André Larue, Pierre Onteniente, l'ami de toujours, et le sétois Emile Miramont, futur "Corne d'auroch"
  3. Série de 13 poèmes comprenant notamment "La vieille bretonne", "les juges", "Les héros", "l'ignorant", "l'incompris"...À la venvole, Albert Messein éditeur, Paris, 1942
  4. Voir la fiche de présentation du livre d'André Sève Georges Brassens et André Sève
  5. Voir le livre-souvenirs de René Iskin "Dans un camp, Basdorf 1943, Georges Brassens et moi avions 22 ans", éd. Didier Carpentier, novembre 2005, 256 pages, isbn 978-2-84167-365-0
  6. Chanson Reprise sur le disque 33 tours 25 cm n° 2
  7. Selon André Larue, elle inspire aussi à Brassens "Le mauvais sujet repenti" et a sans doute servi en partie de modèle pour "Brave Margot" ou "La mauvaise réputation"

Sélection bibliographique

  • Mario Poletti, "Brassens l'ami", éditions du Rocher, 2001
  • René Fallet, Brassens, éditions Denoël, 1967
    - - - réédition augmentée d’extraits inédits du Journal de A à Z sur Brassens : éditions Denoël, octobre 2001
  • Hervé Bréal, Brassens de A à Z, éditions Albin Michel, 2001
  • François Ruy-Vidal (conception, présentation), Jean-François Ferrané, Anne-Marie Gaignière et Philippe Gavardin (ill. Alain Letort, Alain Gauthier, Gérard Hauducœur, Bernard Durin, Serge Cecarelli, Bruno Raffaelli, Claude Lapointe), Georges Brassens : 35 chansons chantées par Georges Brassens, publiées de 1952 à 1956, Marcom Music, coll. « Publication Alain Pierson », 1977, 168 pages

Voir aussi

<< Christian Broussas – GB Larue 2 - 26/12/2012 <><> © • cjb • © >>

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